Théâtre
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Objet d'étude :
Le texte théâtral et sa représentation, du XVIIe siècle à nos jours.

Problématique : Comment le théâtre questionne-t-il le théâtre ?

I - Plan de travail : rappel du corpus

Objet 1, séq. 2 : étude d'une oeuvre intégrale Objet 1, séq. 1
GT 1 : la scène d'exposition
Objet 1, séq. 3
GT 2 : corpus d'un devoir
Objet 1, séq. 4
GT 3 : Vu au TnBA
La Cantatrice chauve (E. Ionesco)   Dom Juan (Adaptation M. Bluwal) Marie-toi : Antigone (Anouilh) 1L/Es : Suréna (Corneille/Wajeman)
Sc.1 : scène d'exposition   Jacques et son Maître (Kundera) Suréna A.I, sc.1 (Corneille) 1L : Ziggy stardust (R. Cojo)
Sc.4  (extrait)   Antigone (Anouilh) Antigone A.I sc.1 (Cocteau) 1L : Bullet Park (J. Cheever)
Sc.5  (sc. entière)   Jeu de l'amour (Marivaux) Art poétique (Boileau) 1Es : Roman d'un trader (D. Benoin)
Sc.11 : dénouement   Barbier de Seville (Beaumarchais) Invention : Imaginer une préface rédigée par un dramaturge qui refuse les conventions classiques 1Es : Guantanamo (É. Vigner)
Sc.8 (extrait)   Cyrano de B. (Rostand)    
         
         

II- Analyse des 4 textes :

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Texte 1 : Antigone, 1946

Lecture cursive

Anouilh Jean
(1910 - 1987)

de « CRÉON : Marie-toi vite... » à « ...votre sale espoir ! »


Marie-toi...

[...]
CRÉON. Marie toi vite, Antigone, sois heureuse. La vie n'est pas ce que tu crois. C'est une eau que les jeunes gens laissent couler sans le savoir, entre leurs doigts ouverts. Ferme tes mains, ferme tes mains, vite. Retiens la. Tu verras, cela deviendra une petite chose dure et simple qu'on grignote assis au soleil. Ils te diront tous le contraire parce qu'ils ont besoin de ta force et de ton élan. Ne les écoute pas. Ne m'écoute pas quand je ferai mon prochain discours devant le tombeau d'Étéocle. Ce ne sera pas vrai. Rien n'est vrai que ce qu'on ne dit pas... Tu l'apprendras toi aussi, trop tard, la vie c'est un livre qu'on aime, c'est un enfant qui joue à vos pieds, un outil qu'on tient bien dans sa main, un banc pour se reposer le soir devant sa maison. Tu vas me mépriser encore, mais de découvrir cela, tu verras, c'est la consolation dérisoire de vieillir, la vie, ce n'est peut-être tout de même que le bonheur.
ANTIGONE, murmure, le regard perdu. Le bonheur...
CRÉON, a un peu honte soudain. Un pauvre mot, hein ?
ANTIGONE, doucement. Quel sera t il, mon bonheur ? Quelle femme heureuse deviendra t elle, la petite Antigone ? Quelles pauvretés faudra t il qu'elle fasse elle aussi, jour par jour, pour arracher avec ses dents son petit lambeau de bonheur ? Dites, à qui devra t elle mentir, à qui sourire, à qui se vendre ? Qui devra t elle laisser mourir en détournant le regard ?
CRÉON, hausse les épaules. Tu es folle, tais toi.
ANTIGONE. Non, je ne me tairai pas ! Je veux savoir comment je m'y prendrai, moi aussi, pour être heureuse. Tout de suite, puisque c'est tout de suite qu'il faut choisir. Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
CRÉON. Tu aimes Hémon ?
ANTIGONE. Oui, j'aime Hémon. J'aime un Hémon dur et jeune ; un Hémon exigeant et fidèle, comme moi. Mais si votre vie, votre bonheur doivent passer sur lui avec leur usure, si Hémon ne doit plus pâlir quand je pâlis, s'il ne doit plus me croire morte quand je suis en retard de cinq minutes, s'il ne doit plus se sentir seul au monde et me détester quand je ris sans qu'il sache pourquoi, s'il doit devenir près de moi le monsieur Hémon, s'il doit apprendre à dire « oui », lui aussi, alors je n'aime plus Hémon !
CRÉON. Tu ne sais plus œ que tu dis. Tais toi.
ANTIGONE. Si, je sais ce que je dis, mais c'est vous qui ne m'entendez plus. Je vous parle de trop loin maintenant, d'un royaume où vous ne pouvez plus entrer avec vos rides, votre sagesse, votre ventre. (Elle rit.) Ah ! je ris, Créon, je ris parce que je te vois à quinze ans, tout d'un coup ! C'est le même air d'impuissance et de croire qu'on peut tout. La vie t'a seulement ajouté tous ces petits plis sur le visage et cette graisse autour de toi.
CRÉON, la secoue. Te tairas tu, enfin ?
ANTIGONE. Pourquoi veux tu me faire taire ? Parce que tu sais que j'ai raison ? Tu crois que je ne lis pas dans tes yeux que tu le sais ? Tu sais que j'ai raison, mais tu ne l'avoueras jamais parce que tu es en train de défendre ton bonheur en ce moment comme un os.
CRÉON. Le tien et le mien, oui, imbécile !
ANTIGONE. Vous me dégoûtez tous avec votre bonheur ! Avec votre vie qu'il faut aimer coûte que coûte. On dirait des chiens qui lèchent tout ce qu'ils trouvent. Et cette petite chance pour tous les jours, si on n'est pas trop exigeant. Moi, je veux tout, tout de suite, — et que ce soit entier — ou alors je refuse ! Je ne veux pas être modeste, moi, et me contenter d'un petit morceau si j'ai été bien sage. Je veux être sûre de tout aujourd'hui et que cela soit aussi beau que quand j'étais petite — ou mourir.
CRÉON. Allez, commence, commence, comme ton père !
ANTIGONE. Comme mon père, oui ! Nous sommes de ceux qui posent les questions jusqu'au bout. Jusqu'à ce qu'il ne reste vraiment plus la petite chance d'espoir vivante, la plus petite chance d'espoir à étrangler. Nous sommes de ceux qui lui sautent dessus quand ils le rencontrent, votre espoir, votre cher espoir, votre sale espoir !



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Ouverture sur les autres textes

 

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Texte 2 : Suréna, 1674

Lecture cursive

Corneille
(1606-1684)

« EURYDICE - Ne me parle plus... » à « ...j'achève l'histoire »



EURYDICE - Ne me parle plus tant de joie et d'hyménée ;
Tu ne sais pas les maux où je suis condamnée,
Ormène, c'est ici que doit s'exécuter
Ce traité qu'à deux rois il a plu d'arrêter ;
Et l'on a préféré cette superbe ville,
Ces murs de Séleucie, aux murs d’Hécatompyle.
La reine et la princesse en quittent le séjour,
Pour rendre en ces beaux lieux tout son lustre à la cour.
Le roi les mande exprès, le prince n'attend qu'elles ;
Et jamais ces climats n'ont vu pompes si belles.
Mais que servent pour moi tous ces préparatifs,
Si mon cœur est esclave et tous ses vœux captifs,
Si de tous ces efforts de publique allégresse
Il se fait des sujets de trouble et de tristesse ?
J'aime ailleurs.
ORMÈNE - Vous, madame ?
EURYDICE - Ormène, je l'ai tu
Tant que j'ai pu me rendre à toute ma vertu.
N'espérant jamais voir l'amant qui m'a charmée,
Ma flamme dans mon cœur se tenait renfermée :
L'absence et la raison semblaient la dissiper ;
Le manque d'espoir même aidait à me tromper.
Je crus ce cœur tranquille, et mon devoir sévère
Le préparait sans peine aux lois du roi mon père,
Au choix qui lui plairait. Mais, ô dieux ! Quel tourment,
S'il faut prendre un époux aux yeux de cet amant !
ORMÈNE - Aux yeux de votre amant !
EURYDICE - Il est temps de te dire
Et quel malheur m'accable, et pour qui je soupire.
Le mal qui s'évapore en devient plus léger,
Et le mien avec toi cherche à se soulager.
Quand l'avare Crassus, chef des troupes romaines,
Entreprit de dompter les Parthes dans leurs plaines,
Tu sais que de mon père il brigua le secours ;
Qu'Orode en fit autant au bout de quelques jours ;
Que pour ambassadeur il prit ce héros même,
Qui l'avait su venger et rendre au diadème.
ORMÈNE - Oui, je vis Suréna vous parler pour son roi,
Et Cassius pour Rome avoir le même emploi.
Je vis de ces états l'orgueilleuse puissance
D'Artabase à l'envi mendier l'assistance,
Ces deux grands intérêts partager votre cour,
Et des ambassadeurs prolonger le séjour.
EURYDICE - Tous deux, ainsi qu'au roi, me rendirent visite,
Et j'en connus bientôt le différent mérite.
L'un, fier et tout gonflé d'un vieux mépris des rois,
Semblait pour compliment nous apporter des lois ;
L'autre, par les devoirs d'un respect légitime,
Vengeait le sceptre en nous de ce manque d'estime.
L'amour s'en mêla même ; et tout son entretien
Sembla m'offrir son cœur, et demander le mien.
Il l'obtint ; et mes yeux, que charmait sa présence,
Soudain avec les siens en firent confidence.
Ces muets truchements surent lui révéler
Ce que je me forçais à lui dissimuler ;
Et les mêmes regards qui m'expliquaient sa flamme
S'instruisaient dans les miens du secret de mon âme.
Ses vœux y rencontraient d'aussi tendres désirs :
Un accord imprévu confondait nos soupirs,
Et d'un mot échappé la douceur hasardée
Trouvait l'âme en tous deux toute persuadée.
ORMÈNE - Cependant est-il roi, madame ?
EURYDICE - Il ne l'est pas ;
Mais il sait rétablir les rois dans leurs états.
Des Parthes le mieux fait d'esprit et de visage,
Le plus puissant en biens, le plus grand en courage,
Le plus noble : joins-y l'amour qu'il a pour moi ;
Et tout cela vaut bien un roi qui n'est que roi.
Ne t'effarouche point d'un feu dont je fais gloire,
Et souffre de mes maux que j'achève l'histoire. […]



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Thématique

Situation

ConclusionRemarque

 

 

Ouverture sur les autres textes

 

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Texte 3 : Antigone (1922)

Lecture cursive

Jean Anouilh (1889-1963)

de « L'extrême vitesse ... » à « ...moi, j'enterrerai »

Acte I Scène 1.


L'extrême vitesse de l'action n'empêche pas les acteurs d'articuler beaucoup et de remuer peu. Le chœur et le coryphée se résument en une voix qui parle très haut et très vite comme si elle lisait un article de journal. Cette voix sort d'un trou, au centre du décor. Naturellement, aucune figuration n'escorte les personnages. Le rideau se lève sur Antigone et Ismène, de face, immobiles l'une contre l'autre. Devant le palais de Thèbes.

ANTIGONE : Ismène, ma sœur, connais tu un seul fléau de l'héritage d'Œdipe que Jupiter nous épargne ? Eh bien, je t'en annonce un autre. Devine la honte que nos ennemis préparent contre nous.
ISMÈNE : Je ne devinerai pas. Depuis que nos deux frères se sont entre-tués, depuis que la troupe des Argiens a disparu, je ne vois rien qui puisse me rendre plus malheureuse ou plus heureuse.
ANTIGONE : Écoute, je t'ai fait sortir du vestibule pour que personne au monde ne nous entende.
ISMÈNE : Qu'y a-t-il ? Tes yeux me bouleversent.
ANTIGONE : Tu me demandes : Qu'y a-t-il ? Hé ! Créon ne donne-t-il pas la sépulture à l'un de nos frères et ne la refuse-t-il pas à l'autre ? Étéocle aura l'enterrement qu'il mérite, mais il est défendu d'ensevelir Polynice ou de le pleurer. On le laisse aux corbeaux. Tels sont les ordres que le noble Créon promulgue pour toi et pour moi, oui pour moi. Il va venir en personne, ici même, lire son décret. Il attache la plus grande importance à l'exécution de ses ordres. Les enfreindre, c'est être lapidé par le peuple. Voilà. J'espère que tu vas montrer ta race.
ISMÈNE : Mais que puis-je ?
ANTIGONE : Décide si tu m'aides.
ISMÈNE : À quoi ?
ANTIGONE : À soulever le mort.
ISMÈNE : Tu veux l'enterrer malgré le roi ?
ANTIGONE : Oui. J'enterrerai mon frère et le tien. Je dis le tien. On ne me reprochera pas de l'avoir laissé aux bêtes.
ISMÈNE : Malheureuse ! Malgré la défense de Créon ?
ANTIGONE : A-t-il donc le droit de me détacher des miens ?
ISMENE : Antigone ! Antigone ! notre pauvre père est mort dans la boue après s'être crevé les yeux pour expier ses crimes ; notre mère, qui était sa mère, s'est pendue ; nos frères se sont entr'égorgés. Imagine, nous deux, toutes seules, la fin sinistre qui nous attend si nous bravons nos maîtres. Nous sommes des femmes, Antigone, des femmes malhabiles à vaincre des hommes. Ceux qui commandent sont plus forts que nous. Que Polynice m'excuse, mais je cède. J'obéirai au pouvoir. Il est fou d'entreprendre des choses au-dessus de ses forces.
ANTIGONE : Je ne te pousse pas. Si tu m'aidais, tu m'aiderais à contrecœur. Agis comme bon te semble. Pour moi, j'enterrerai.
[…]



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Axes de résolution

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En quoi cette scène est-elle une scène d'exposition ?

Une scène informative : dialogue à l'intention du spectateur

Ouverture externe (culturelle) ou interne (la fable) ET vers une question d'entretien préparée

Conformisme ou originalité de cette scène... Serait-elle choquante au XVIIe siècle ?

 

Présentation de personnages : une galerie de portraits

 

Le Prologue (personnage) fait à la fois des portraits et un résumé...

 

 

 

Quel sens attribuer au projet de la pièce maintenant ?

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Texte 4 : In Art Poétique, 1674

Lecture cursive

Boileau
(1636-1711)

De « Voulez-vous... » à « ...une face imprévue. »



Voulez-vous sur la scène étaler des ouvrages
Où tout Paris en foule apporte ses suffrages,
Et qui, toujours plus beaux, plus ils sont regardés,
Soient au bout de vingt ans encor redemandés ?
[…] Le secret est d'abord de plaire et de toucher :
Inventez des ressorts qui puissent m'attacher.

Que dès les premiers vers l'action préparée
Sans peine du sujet aplanisse l'entrée.
Je me ris d'un acteur qui, lent à s'exprimer
De ce qu'il veut, d'abord ne sait pas m'informer,
Et qui, débrouillant mal une pénible intrigue,
D'un divertissement me fait une fatigue.
J'aimerais mieux encor qu'il déclinât son nom,
Et dît : « Je suis Oreste, ou bien Agamemnon »,
Que d'aller, par un tas de confuses merveilles,
Sans rien dire à l'esprit, étourdir les oreilles.
Le sujet n'est jamais assez tôt expliqué.
Que le lieu de la Scène y soit fixe et marqué.
Un rimeur, sans péril, delà les Pyrénées,
Sur la scène en un jour renferme des années.
Là, souvent, le héros d'un spectacle grossier,
Enfant au premier acte, est barbon au dernier.
Mais nous, que la raison à ses règles engage,
Nous voulons qu'avec art l'action se ménage ;
Qu'en un lieu, qu'en un jour, un seul fait accompli
Tienne jusqu'à la fin le théâtre rempli.

Jamais au spectateur n'offrez rien d'incroyable
Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable.
Une merveille absurde est pour moi sans appas :
L'esprit n'est point ému de ce qu'il ne croit pas.
Ce qu'on ne doit point voir, qu'un récit nous l'expose
Les yeux, en le voyant, saisiraient mieux la chose ;
Mais il est des objets que l'art judicieux
Doit offrir à l'oreille et reculer des yeux.
Que le trouble toujours croissant de scène en scène
À son comble arrivé se débrouille sans peine.
L'esprit ne se sent point plus vivement frappé
Que lorsqu'en un sujet d'intrigue enveloppé,
D'un secret tout à coup la vérité connue
Change tout, donne à tout une face imprévue.



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